(Elena) Tout le monde pense que je suis hypocondriaque. Ça me rend malade.

Je suis née quatre ans après Ethan, mon frère ainé. Enfin, mon demi-frère plutôt, car nous n’avons pas la même mère. J’imagine que ma naissance n’avait pas dû le réjouir car il n’a jamais apprécié ma mère. Je suppose qu’en cas de divorce, c’est normal. Enfin, même demi, Ethan reste mon frangin et si je ne suis pas toujours tendre avec lui, même si je ne le montre pas, je l’aime de tout mon cœur. Parce que oui, malgré tout, je suis capable d’aimer. Je ne suis pas entièrement monstrueuse. À ma première rentrée scolaire, alors que je n’avais que trois ans, Ethan était là pour me protéger des grands. À ce moment-là, j’étais encore une petite fille douce et obéissante, une enfant adorable. Un brun espiègle, mais mignonne malgré tout. Les choses ont vites fini par changés quand j’en ai eu assez d’être persécuté par plus grand que moi, je me suis mise à me défendre, non pas en jouant des points, mais en jouant avec les mots. La gamine douce et pleurnicharde était devenue une petite princesse capricieuse, et elle l’est resté. Prête à tout pour obtenir ce que je convoitais, j’usais et abusais du chantage. Aux autres gosses, je disais ou plutôt j’ordonnais, « donne-moi ta poupée ou ton gouté, sinon, je dis à tout le monde que tu as fait pipi dans ta culotte ! », à mon père, c’était « je veux du chocolat ! si tu m’en donne pas, j’arrête de respirer ! » et à mon frère, quand il était à la maison, « je veux ta chambre, si tu ne me la donne pas, je dis à papa que t’a embrassé une fille derrière le local à poubelles. » Ce tempérament de petite peste, c’est davantage accentuer lorsque ma mère est morte d’un cancer, alors que je n’avais que six ans. Au départ, ce n’était que des gamineries, ça serait sans doute passé ou peut-être pas, je ne pouvais pas le prévoir à l’avance, j’étais trop petite. Un enfant, ça a besoin de ses deux parents, plus encore de sa mère et ça, mon père avait du mal à le gérer, alors il s’est servi de mes caprices pour me rendre les choses plus faciles. Je n’avais qu’à ouvrir la bouche pour obtenir gain de cause. À la longue, je me suis tellement habituée à cette attitude, que je l’ai conservé, je pouvais faire ce que je voulais sans me soucier des conséquences et je dois dire que c'est agréable. J’ai intégré une école privée, à ma demande. Mon père a de l’argent et je ne voyais pas l’intérêt d’être dans une école classique, de me trouver avec des camarades venant d’un milieu social différent, pauvre. Pour moi, les gens qui n’ont pas d’argent sont des profiteurs, ils attendent tous des autres, ils m’énervent à faire la quête et à passer des heures à remplir des formulaires pour en obtenir d’autres. Enfin, ce n’est que mon point de vue et je moque de choquer ceux qui ne le parage pas. On ne peut pas plaire à tout le monde … Je parlais donc de mon école privée, elle n’était pas stricte comme certaines écoles, par exemple, il n’y avait pas d’uniforme obligatoire pour les élèves, et la seule chose que je devais respecter, c'était mes tenues. J’ai toujours supposé que la directrice devait être une vieille fille complètement coincée et de ce fait, je devais éviter le maquillage et les tenues jugées trop féminines. Mais, je n'avais pas dit mon dernier mot, je partais de chez moi, habillée d'un pantalon et d'un pull-over trop grand pour moi et dès que la maison était loin, je me changeais derrière un arbre ou une voiture. J'arborais alors des jupes très courtes et des décolletés vertigineux. J'en ai fait tourner des têtes, j'en ai brisé des cœurs, et je continue d'ailleurs, parce que l'amour, ce n'est pas mon truc. On n'a qu'une seule vie et elle est courte, alors je veux en profiter un maximum, tout simplement. J'ai détesté l'école, parce que je trouvais inutile d'apprendre toutes ses choses. Je savais m’entourer des personnes qui, je le savais, m’apportait un certain bénéfice. En amitié, comme en amour, je savais dire stop, lorsque je n'avais plus rien à y gagner. Mon histoire la plus sérieuse à durer deux mois, mais elle n'avait d’intérêt à mes yeux que pour gagner une certaine popularité. Le garçon en question était capitaine de l’équipe de basket-ball de mon école. Je l’ai quitté aussitôt le statut tant convoité et il n’a pas tellement apprécié puisqu’il m’a collé une réputation de Marie couches-toi là. Mais je n’en avais que faire, car après tout, je voulais m’amuser. Aujourd’hui, j’ai vingt-et-un ans, presque vingt-deux et je ne travaille pas. J’ai arrêté les études, si tôt mon baccalauréat en poche et si je ne bosse pas, ce n’est parce que je ne trouve pas, mais plutôt parce que je ne cherche pas. Mon père est riche et sa fortune me reviendra. Quel intérêt aurais-je à m’abrutir avec un boulot nul et mal payé ?

Mais, tout ça, c'était il y à trois ans ... Car depuis, pas mal de choses ont changés. Pour commencé, j'ai retrouvé ce fameux ex petit ami. Et même si les choses ont bien mal démarrées entres nous, parce qu'il m'en voulait un peu. Nous avons finis par nous revoir à plusieurs reprises. Souvent par hasard, mais également parce qu'on l'avait décidé. Nous sommes allés voir un concert de rock ensemble et ça c'est très bien passé. Au point que je me demande si il y a autre chose qu'une banale histoire d'amitié entre lui et moi. Et puis, j'ai aussi trouvé du travail. J'ai repris mes études. Tout ça grâce à lui ! Je suis devenue une meilleure personne, même si, dans le fond, j'aurais toujours ce côté princesse pourrie gâtée qui me collera aux fesses parce que mon très cher frère ne cessera jamais de le répéter encore et toujours !